mercredi 4 mars 2015

RIP Ric : Renaissance ou enterrement de première classe ?


(cliquez sur les images pour agrandir)

Depuis la mort de Tibet en 2010 (déjà 5 ans ! ) et la quasi retraite ( mise à la retraite ?) d'André-Paul Duchâteau, j'appréhendais et souhaitais en même temps le retour de Ric Hochet. 

Appréhendais parce que d'une part les deux papas du célèbre détective avaient déjà bien tiré sur la corde pour un total de 78 enquêtes dont le dernier tiers traînait franchement la langue et que je ne voyais donc pas bien quelles possibilités il restait à explorer. Parce qu'il est parfois souhaitable qu'un héros ne survive pas à ses créateurs. Parce qu'enfin rien ne dit que, malgré la lassitude et les incohérences des ultimes histoires, l'herbe soit plus verte ailleurs. Ric Hochet est, quoi que puissent en dire ses détracteurs, un monument de la BD franco-belge qui a fait les beaux jours du journal Tintin et que reprendre le personnage et son univers reste une gageure.

Souhaitais parce que ce personnage m'a accompagné pendant tellement d'années qu'on a du mal à se résoudre au mot fin. Les personnages me manquent, les intrigues, même tarabiscotées, me manquent, les atmosphères policières teintées d'un léger soupçon de fantastique parfois me manquent. Tibet me manque. Souhaitais aussi parce qu'un hommage, quel qu'il soit, reste une entreprise louable. Au début des années 2000, Ric Hochet n'était plus le succès éditorial de sa grande époque et Le Lombard prend aussi un risque (calculé quand même) en "ressuscitant" son héros. 


Du coup, je me suis jeté sur la revue L'Immanquable et ses prépublications pour avoir un avant-goût de ce que la nouvelle équipe aux commandes, Zidrou au scénar et Simon Van Liemt aux crayons, nous avait concocté.

Avant toute chose, je dois avouer que concernant Ric Hochet, je me considère comme un puriste et qu'a priori je ne suis pas friand des artistes qui se réapproprient un personnage emblématique d'une époque, aussi révolue fut-elle. Les deux planches ci-dessous montrent le Ric Hochet de Tibet et j'ai la nostalgie de ce dessin-là, avec sa part de douce désuétude et la technique de ligne claire (traits "simples", aplats de couleurs). J'aime ce qui se dégageait des décors de Desmit ou Brichau. J'aime le sens du mouvement et de la mise en scène de Tibet, surtout dans la première moitié de l'oeuvre gigantesque qu'est Ric Hochet. J'aime ne connaître l'identité de l'assassin qu'à la toute dernière page des enquêtes. Bref, je n'aime pas l'idée que l'on touche à l'un de mes personnages de BD préférés, malgré le manque auquel je faisais référence plus haut.



Et bien, je dois reconnaître que les 14 premières pages (Pour le reste, je vais devoir prendre mon mal en patience puisque la prépublication s'étalera sur 3 ou 4 revues mensuelles L'Immanquable avant que la BD "RIP Ric" ne sorte véritablement fin mai) ont été une très agréable surprise. J'espère vraiment que la suite sera du même tonneau et on aura alors un album indispensable. Les deux planches ci-dessous donnent une idée de la patte graphique de Van Liemt. On est bien loin de Tibet mais étrangement cela ne me gêne pas le moins du monde, ce qui est déjà un petit miracle en soi me concernant. La mise en scène est séduisante, le dessin a du cachet bien qu'il reste particulier à mon sens, le travail sur les ombres et les couleurs a du charme bref je suis vraiment content de cette découverte. Mais c'est surtout du côté du scénario de Zidrou que mon cœur balance. L'intrigue est bourrée de références aux anciens Ric Hochet, jusqu'à la représentation de la stagiaire du journal La Rafale, clin d'oeil évident à Edith, la secrétaire coupable du tome 16, Requiem pour une Idole. Zidrou a, de plus, deux excellentes idées : faire se confronter Ric à celui qui fut son tout premier adversaire dans la série originelle : le Caméléon. Et installer son intrigue dans le Paris de la fin des années 60, ce qui lui permet de repartir sur de bonnes bases par rapport à l'année de création de la série (1955) et de s'assurer ainsi que Ric Hochet et son microcosme garderont un charme un peu rétro, sans la surenchère de progrès technologiques qui handicapait fortement les dernières histoires du duo Tibet & Duchâteau qui avait un peu de mal à composer avec l'évolution technologique à l'aube des années 2000. Au moins, avec ce parti pris assumé, le problème ne se posera plus.




Je pourrais encore longtemps parler de ce coup de cœur mais n'ayant vu que la partie désormais émergée de l'iceberg, j'attendrais de connaître la suite puis la fin avant de donner une opinion définitive. Mais cela part tellement bien qu'une pirouette scénaristique non maîtrisée en fin d'intrigue serait un écart impardonnable. Donc je veux résolument croire que le reste est du même tonneau et que je vais prendre un pied pas possible jusqu'au bout. J'espère surtout que cet album aura un beau succès critique et commercial. Que ceux qui ne connaissaient pas Ric Hochet vivront une belle découverte. Que ceux qui ont suivi les péripéties du journaliste détective, avec parfois une pointe de déception dans les yeux lors des ultimes fournées, se réconcilieront avec un personnage définitivement indispensable. En tout cas, Zidrou a montré ici un respect de chaque instant pour le matériau originel, bien servi par le trait surprenant de prime abord mais plein de promesses de Simon Van Liemt. Chapeau bas, les gars ! Allez, je vous laisse avec une curiosité. deux planches du dessinateur Wozniak qui avait été un temps pressenti pour reprendre le flambeau. Je ne sais pas pourquoi Le Lombard a finalement opté pour une autre équipe mais je trouve vraiment que son travail avait un charme fou et qu'il était d'ailleurs pour le coup beaucoup plus fidèle à l'esprit de Tibet. Mais c'est probablement une autre histoire... 

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